Œuvre majeure

Lance d’apparat de Cutry

Début du Ve siècle
Fer, alliage cuivreux, argent, laiton et cuivre rouge
Inv. 2018.8.1
Acquise en 2018 par la Ville de Nancy grâce au soutien du Ministère de la Culture, de la Région Grand Est, du groupe immobilier Duval, et de 145 particuliers ayant pris part à la souscription organisée par la Société d’Histoire de la Lorraine et du Musée lorrain.

 

Cette lance sans équivalent en Europe a été mise au jour sur la commune de Cutry, dans le nord de la Meurthe-et-Moselle, par l’archéologue René Legoux en 1991. À l’époque gallo-romaine, Cutry constitue une agglomération secondaire de la cité des Trévires. L’occupation du site y est quasiment continue entre le Ier siècle et la fin du VIIe ou le début du siècle suivant. De 1972 à 1991, la nécropole de Solmon a livré plus de 800 sépultures antiques à incinération et 284 tombes mérovingiennes. Attribuable par comparaisons au IVe siècle, la lance a été trouvée en remploi dans une sépulture, malheureusement pillée, datant vraisemblablement de la seconde moitié du VIe siècle. Il est possible que ce remploi révèle la pratique de transmission, de génération en génération, d’un objet encore considéré comme exceptionnel deux siècles après sa fabrication.

La lance est presque intacte. Elle porte un remarquable décor damasquiné trichrome (argent, cuivre et laiton) à motifs de torsades, cercles concentriques, croix et sinusoïdes. Une longue inscription latine en argent orne les deux faces de la flamme. Elle a été traduite de la façon suivante par le chercheur polonais Krzysztof Rzepkowski :

Que tire cette lance dans de vastes forêts,
Celui qui se plaît à affronter les bêtes féroces

La forme de l’arme et l’inscription explicite « VENABULA » indiquent que la pièce n’est pas un simple fer de lance, mais bien un épieu de chasse, arme d’estoc, munie d’une longue hampe de bois d’environ deux mètres, suffisamment longue pour protéger le chasseur face au gibier. Il n’est pas étonnant de voir mise en avant ici la pratique de la chasse, une des occupations favorites des élites masculines franques et germaniques. Cependant, Il est permis de se demander si l’arme, avant tout symbole de prestige, a vraiment été utilisée.