Berger et bergère
Attribué à la Manufacture de Saint-Clément
Attribué à la Manufacture de Saint-Clément
Paul-Louis Cyfflé (auteur du modèle)
Fin du XVIIIe siècle ou début du XIXe siècle
Biscuit de terre de pipe
H. 21,5 ; L. 16 ; P. 14 cm
Inv. 95.907
Achat auprès d’Alexandre Thomas, 1869
Sur un socle ovale, un berger assis lève la tête vers une paysanne qui, debout à ses côtés, s’apprête à lui retirer son chapeau. Le jeune homme est vêtu d’une culotte, d’une veste, d’une chemise ample ouverte sur la poitrine et chaussé de bas et de souliers à boucles. De son bras gauche, il enlace sa compagne dont il retrousse l’arrière de la jupe dans un geste équivoque. La jeune femme, dont l’élégance est marquée par le port de chaussures à boucle et à talons, porte une chemise aux manches relevées, un corsage lacé sur le devant, une jupe et un tablier. Ses cheveux relevés en un chignon sont ceints par un bandeau attaché par un nœud. Un panier de linge et une quenouille sont posés à ses pieds.
Les relations amoureuses dans un cadre bucolique ont très largement inspiré les arts au XVIIIe siècle. La poésie et le théâtre ont mis en scène des couples de bergers et de bergères, à l’image des Vendanges de Tempé, opéra-théâtre de Charles-Simon Favart créé en 1745. Les amours contrariées d’un jeune berger et de sa bergère, Lisette, rencontrent un tel succès qu’elles sont rejouées en 1752 sous le titre La Vallée de Montmorency ou Les Amours villageoises. Ces spectacles ont inspiré les pastorales peintes de François Boucher ou de Jean-Honoré Fragonard. Le thème du berger couronné est repris dans trois comédies : La Coquette fixée, jouée pour la première fois en 1746, Timide ou les Couronnes en 1752 et La Fée Urgèle en 1765. Deux bergers aiment une bergère. Pressée de se déclarer, la jeune femme leur donne rendez-vous. Ôtant la couronne de fleurs qu’elle porte sur sa tête, elle la pose sur celle de l’objet de ses vœux. Le sujet a été exploité par Fragonard dans La Coquette fixée, gravée par Dambrun, L’Heure du berger et L’Amant couronné exécuté pour Madame du Barry en 1773 (aujourd’hui à la Frick Collection à New York) puis repris à Sèvres par Louis-Simon Boizot dans L’Amant couronné en 1784.
Désigné dans les inventaires du musée comme « l’Amour couronné », ce groupe, qui en est en réalité une variante, apparaît au numéro 17 du catalogue de la manufacture de Saint-Clément de 1892 sous le titre Berger et Bergère. L’exemplaire du musée a été acquis auprès d’Alexandre Thomas, directeur de la manufacture durant la seconde moitié du XIXe siècle.
Marie Pintre
Bibliographie :
NOËL (Maurice), « Les biscuits de Cyfflé, étude de thèmes », La Lorraine dans l’Europe des Lumières, Actes du colloque de la Faculté des lettres et des sciences humaines de l’Université de Nancy, 1968, p. 245.
HORIOT (Maïté), Paul-Louis Cyfflé et les terres de Lorraine aux XVIIIe-XIXe siècles dans les collections du Musée Historique Lorrain, mémoire de maîtrise d’histoire de l’art sous la direction de François PUPIL et Francine ROZE, Université de Nancy 2, 2002-2003, pp. 90-91, n°39.
CALAME (Catherine), Cyfflé, orfèvre de l’argile. Ses statuettes en terre de Lorraine et les reprises par les manufactures régionales [cat. exp., « Cyfflé, orfèvre de l’argile », Saint-Clément, 1er août-17 août 2009], Lunéville, Association des Amis de la Faïence ancienne de Lunéville Saint-Clément, Office de Tourisme et château des Lumières, 2009, pp. 80, 84, 115.