Stanislas Leszczynski
Manufacture Cyfflé à Lunéville
Manufacture Cyfflé à Lunéville
Paul-Louis Cyfflé (auteur du modèle), Jean-Baptiste Grandel (repareur)
Vers 1776
Biscuit de porcelaine hybride
H. 57,5 ; L. 26,5 ; P. 34 cm
Inv. D.95.858
Don Payot de Beaumont avant 1840, dépôt du musée des Beaux-Arts de Nancy, 1850
Marque TERRE DE LORRAINE estampée en creux et initiales JG à la pointe
Attribuée par erreur au sculpteur Barthélémy Guibal et à la manufacture de Niderviller dans le catalogue du musée de 1895, cette statuette est en réalité due à son élève Paul-Louis Cyfflé comme l’indique la marque de sa manufacture et les initiales du repareur Jean-Baptiste Grandel situées sous le socle. Trois fois plus grande que les biscuits ordinaires, elle est offerte par l’artiste à la Société Royale des Sciences, Arts et Belles Lettres fondée en 1750 par le roi Stanislas et constitue sans conteste son chef-d’œuvre. Les membres de la Société décident de le remercier en lui octroyant le prix des Arts qu’il reçoit solennellement le 8 mai 1778, jour de la Saint-Stanislas. Le don de la statue semble néanmoins avoir été fait avant 1777 car la mention du prix qui doit lui être décerné apparaît déjà dans le registre des dépenses de la Généralité de Lorraine de janvier 1777. La statue est alors exposée dans le salon carré de l’hôtel de ville où la Société tient ses séances publiques. Ses membres peuvent y admirer le roi de Pologne, décédé onze ans plus tôt, vêtu à l’antique d’une cuirasse recouverte d’un manteau d’hermine. L’aspect militaire de la composition est accentué par le bâton de commandement, l’épée portée au côté et le casque orné d’une couronne de laurier, aujourd’hui disparu, qui se trouvait posé sur le socle. De la main gauche, le monarque s’appuie sur une monumentale corne d’abondance déversant les bienfaits du souverain sur ses duchés tandis qu’à l’arrière de l’œuvre un compas, un rapporteur, un buste, un livre, une palette et un globe le désignent comme protecteur des arts, des sciences et des lettres. La représentation fait écho au fronton de la caserne Sainte-Catherine sculpté par Jean-Joseph Söntgen d’après un dessin de Jean Girardet.
Cyfflé recueille les éloges des académiciens ravis de cet hommage rendu à leur fondateur. Il est ainsi désigné comme un « artiste connu par des productions où règnent le goût et le génie » et mérite d’être récompensé « tant par la qualité que par le mérite du dessein et la perfection de l’exécution » de sa statuette. La presse se fait également l’écho de la séance. Si L’Affiche pour les Trois-Évêchés est très élogieuse considérant que l’œuvre valait au moins le double de la récompense reçue et que « le célèbre et vertueux artiste (…) avait travaillé plutôt pour la gloire que pour l’intérêt », Le Journal de Lorraine et Barrois se montre plus critique, précisant que Cyfflé avait donné une taille trop mince au roi de Pologne et que les jambes étaient trop fortes par rapport au corps. Le rédacteur précise néanmoins : « Nous n’eûmes rien à répondre quand on nous dit que le Roi de Pologne, dans ses dernières années, avait les jambes très-grosses ». Le chancelier Chaumont de La Galaizière possédait également en 1775 dans le cabinet de jour de son château de Neuviller-sur-Moselle une « magnifique statue » du roi de Pologne par Cyfflé mais il est difficile d’établir s’il s’agit du même modèle.
Pierre-Hippolyte Pénet
Bibliographie :
NOËL (Maurice), Recherches sur la céramique lorraine au XVIIIe siècle, thèse de doctorat (non publiée), Université de Nancy, faculté de Lettres, 1961, pp. 117-121.
NOËL (Maurice) in BASTIAN (Jacques) (dir.), Notice dans Faïences de Lorraine, 1720-1840, [cat. exp., Nancy, Musée lorrain, 14 mai-29 septembre 1997], Nancy, éditions du Pays Lorrain, 1997, p. 81.
NOËL (Maurice), « Les acquéreurs de statuettes en terre de Lorraine », Le Pays lorrain, Nancy, 1998, p. 37.
CALAME (Catherine), Cyfflé, orfèvre de l’argile. Ses statuettes en terre de Lorraine et les reprises par les manufactures régionales [cat. exp., « Cyfflé, orfèvre de l’argile », Saint-Clément, 1er août-17 août 2009], Lunéville, Association des Amis de la Faïence ancienne de Lunéville Saint-Clément, Office de Tourisme et château des Lumières, 2009, p. 33.
CALAME (Catherine) et MAGGETTI (Marino), « Paul-Louis Cyfflé et ses recettes de Terre de Lorraine », Revue de la société des amis du Musée national de la céramique, n°21, 2012, p.74-86.