Vitraux provenant de l’Église des Cordeliers

Atelier Pierre Hemmel dit d’Andlau

Atelier Pierre Hemmel dit d’Andlau
Élément de tête de lancette : pinacle et motifs floraux
1486-1487
Vitrail
Nancy, Palais des ducs de Lorraine - Musée lorrain,
inv. 2007.0.4774
Fonds ancien

Anonyme
Élément de tête de lancette : putti portant une guirlande
1ère moitié du XVIe siècle
Vitrail
H. 29,4 ; l. 29,2 cm
Nancy, Palais des ducs de Lorraine - Musée lorrain,
inv. 2007.0.4773
Fonds ancien

Les deux modestes têtes de lancette ici présentées ont une valeur certaine car elles sont les deux seuls fragments rescapés des anciens vitraux posés dans l’église des Cordeliers de Nancy et disparus suite aux destructions de la période révolutionnaire. Décidé après la victoire de 1477 contre Charles Le Téméraire et destiné à devenir le mausolée des ducs auprès de leur palais, le sanctuaire reçut en effet un ensemble de 13 verrières entre 1487 et le milieu du XVIe siècle. La famille régnante, René II et la duchesse Yolande d’Anjou puis le duc Antoine, prit l’initiative des premières et principales commandes (7 au total), suivie de la vieille noblesse lorraine et du milieu des officiers anoblis. Grâce à la documentation archivistique et le soin du graveur qui a réalisé la pompe funèbre de Charles III, le programme vitré est heureusement connu. Il offrait des scènes christiques et hagiographiques, mêlées à une constante célébration dynastique : les ducs apparaissent aux côtés de saint René, de saint Georges ou encore de saint Jean-Baptiste guérissant René et la duchesse. L’ensemble révèle tout à la fois l’activité soutenue  des verriers lorrains (Honoré Perrenet ou Nicolas Graxien) et celle des maîtres extérieurs aux duchés qui les ont précédé avant 1500.

C’est précisément le cas à propos du fragment le plus ancien, partie sommitale d’un dais d’architecture arborescente sur fond de damas rouge, élément caractéristique de l’art du strasbourgeois Pierre Hemmel dit d’Andlau. Très renommé, à la tête d’un atelier rayonnant au-delà des Vosges (Saint-Nicolas-de-Port, Metz), il reçut en 1486 commande des trois principales verrières pour l’importante somme de 150 écus d’or. Le pinacle représenté est accompagné  d’une ornementation florale d’inspiration clairement mariale.

La seconde tête de lancette préservée, certainement réalisée dans le second quart du XVIe siècle, propose un décor ornemental d’inspiration italienne. Les putti avec guirlande (reggifestone) sont en effet parmi les premiers motifs renaissants en voie de généralisation tant en peinture que sur les vitraux. Par une prise inversée peu naturelle, les deux personnages tiennent un feston dorée, végétale et sans fruits, semblable à une corde tressée. Si l’impression de symétrie géométrique domine, celle-ci n’est pas totale, chaque figure se singularisant par le traitement distinct des visages et des corps peu enfantins. On peut supposer que le rythme et la répétition donnés ici se poursuivaient peut-être sur les têtes de lancette voisines, créant comme le spectacle horizontal d’une frise.

Stefano Simiz

Bibliographie :

Vitraux de France du Moyen Age à la Renaissance. Alsace, Lorraine, Franche-Comté, Colmar, SAEP, 1970, p. 129-133.

HEROLD Michel, « Les vitraux perdus de l’Eglise des Cordeliers de Nancy », Bulletin Monumental, 1984, vol. 142/2, p. 159-172.

MARTIN Philippe, La pompe funèbre de Charles III. 1608, Metz, Éditions Serpenoise, 2008, 193 p.