Marche du mariage de Monseigneur le prince de Lixin [...]

Claude Jacquart

Claude Jacquart (1686, Nancy –1736, Nancy)
La marche du mariage de monseigneur le prince de Lixin grand maître de la maison de Son Altesse Royale avec Mademoiselle de Craon l’année 1721

1721
Huile sur toile
H. 72 ; l. 121 cm
Lunéville, Musée du château des Lumières, inv. 2015.4.1
Achat en vente publique avec préemption de l’État, 2015

Formé à Nancy puis à Rome, Claude Jacquart appartient aux meilleurs représentants de l’art de cour lorrain. « Peintre ordinaire » du duc Léopold en 1714, il travaille les scènes de batailles, l’histoire religieuse ou mythologique, participe au décor de la primatiale de Nancy sans négliger le portrait. L’aristocratie proche du pouvoir se tourne également vers lui pour en faire le chroniqueur des grands événements familiaux. Le tableau figure ici le cortège d’un mariage quittant le château de Lunéville pour se diriger vers l’église Saint-Jacques. En ce 19 août 1721, c’est là que va avoir lieu la bénédiction nuptiale de Jacques-Henri de Lorraine, issu d’une branche française de la maison ducale, avec Anne-Marguerite, deuxième fille de Marc de Beauvau-Craon, favori en titre. L’union consacre l’ascension de cette famille qui entre alors dans la parentèle de la dynastie régnante. La valeur symbolique de l’événement justifie la commande de cette toile par le père de la mariée, inventoriée à sa mort en 1754 dans son hôtel de Lunéville et restée jusqu’en 2015 dans les collections familiales.

Jacquart exploite la théâtralité de la cour pour traduire le faste du cortège, centré sur le carrosse du duc et de sa famille, qu’encadrent les gardes du corps et les gardes suisses. Lunéville vient de renaître de ses cendres. Après l’incendie du 3 janvier 1719, le premier architecte de Léopold, Germain Boffrand (1667-1754), avait tout d’abord proposé un projet ambitieux, réduit par la volonté d’économie du commanditaire. Le château du début du XVIIe siècle, qui avait survécu malgré les agrandissements, disparaît toutefois. Le nouvel édifice est décrit avec précision par le peintre. Il représente ainsi les toits à faible pente cachés derrière une balustrade, remplacés au début des années 1730 par de hauts combles d’ardoise. Le tableau constitue un témoignage unique de l’aspect du château dans sa majesté première, quand la noble horizontale de ses parties hautes l’inscrivait à la suite des grands chantiers de Louis XIV. À Lunéville, mais aussi au palais ducal de Nancy et au château de La Malgrange, Boffrand exprime le regard très personnel qu’il pose sur la tradition de l’architecture française, mise au service de la célébration d’un pouvoir ducal en sursis.

Thierry Franz

Historique :

Commandé à Claude Jacquart par Marc de Beauvau-Craon, premier prince de Craon, après le mariage en 1721 de sa fille avec Jacques-Henri de Lorraine, prince de Lixheim. Inventorié à la mort de Marc de Beauvau-Craon en 1754 dans le grand appartement de l’hôtel de Craon à Lunéville (Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, 10 B 419). Achat en vente publique en 2015 par le musée du château des Lumières à Lunéville avec préemption de l’Etat.

Expositions :

1766-1966. La Lorraine dans l’Europe artistique du XVIIIe, Nancy, Musée des Beaux-Arts, 1966.

Bibliographie :

TRONQUART Martine, Les Châteaux de Lunéville (Meurthe-et-Moselle), Metz, éditions Serpenoise, 1991.

VOREAUX Gérard, Les Peintres lorrains du dix-huitième siècle, Paris, éditions Messene, 1998.

TRONQUART Martine, « Lunéville : résidence ducale, palais princier, château militaire. Histoire d’une construction », Le Pays lorrain, 2009, n°1, p. 5-18.

FRANZ Thierry, « Lunéville ou les métamorphoses d’une maison de campagne. 1698-1737 », dans collectif, Éclat et scintillement. Lumière sur le décor de la chambre de la duchesse à Lunéville [cat. exp., Lunéville, Musée du château des Lumières, 2 août – 2 novembre 2014], Ars-sur-Moselle, Serge Domini éditeur, 2014, p. 25-37.