Monument funéraire d’Henri Ier, sire de Blâmont, et de Cunégonde de Linange

Lorraine

Cat. 2
Lorraine
Monument funéraire d’Henri Ier, sire de Blâmont, et de Cunégonde de Linange
2e quart du XIVe siècle
Grès
H. 157 ; L. 128 ; Pr. 264 cm
Inv. 95.118
Don Thirion, 1854

Issue de la noblesse lotharingienne puis des fondateurs du comté de Luxembourg, la famille de Salm tire son nom du comté de Salm-en-Ardenne (actuelle Belgique). Elle se divisa en deux branches au XIIe siècle lorsque le comte Henri II créa le comté de Salm dans les Vosges.

Un siècle plus tard, son arrière-petit-fils Henri Ier (1269-1331), deuxième sire de Blâmont, abandonna le nom de Salm et modifia les armes de sa famille, « de gueules semé de croisettes recroisetées au pied fiché d’or à deux saumons d’argent adossés ». Celles-ci perdirent leurs croisettes et leurs saumons furent bientôt remplacés par des bars. Dans un contexte politique complexe où s’affrontaient sans cesse l’évêque de Metz, le comte de Bar et le duc de Lorraine, Henri Ier ceignit sa ville de Blâmont (Meurthe-et-Moselle) de murs, renforça les fortifications de son château et accrut singulièrement le territoire de sa seigneurie. Il fonda en 1301 avec son épouse Cunégonde de Linange la collégiale Saint-Georges de Deneuvre (Meurthe-et-Moselle) avant de se faire inhumer, trente ans plus tard, à l’abbaye de Saint-Sauveur (Meurthe-et-Moselle).

En 1854, ce monument funéraire, miraculeusement préservé de la destruction de l’abbaye en 1568, fut offert au Musée lorrain par le maire de Saint-Sauveur. Il fut d’abord identifié par Auguste Digot comme celui du comte Jean II de Salm (†1351) et de son épouse Marguerite de Chiny avant d’être réidentifié trente-cinq ans plus tard par Edmond de Martimprey comme étant celui d’Henri Ier de Blamont et Cunégonde de Linange. Le style des gisants, confirmant une datation vers le 2e quart du XIVe siècle, plaide en faveur de cette hypothèse de même que les armes apparaissant sur l’écu qui correspondent à celles choisies par Henri Ier. La représentation surprenante des bars, à la tête quasi féline, mérite d’être remarquée. Les deux époux sont représentés allongés, la tête posée sur un coussin, les yeux clos et les pieds appuyés sur un lion et probablement un chien, ce dernier étant très lacunaire.

Les deux parois latérales du monument sont divisées en dix niches à arcatures brisées, accueillant des statuettes entourées, dans les écoinçons, de figures humaines, d’animaux ou d’ornements végétaux. À leur arrivée au musée, ces statuettes furent placées sur trois des faces du monument avant qu’une restauration, en 1936, ne les répartisse telles qu’elles se présentent aujourd’hui. Du côté d’Henri Ier, nous proposons d’identifier un ange thuriféraire, saint Jean l’Évangéliste, entouré dans les écoinçons d’un dragon et d’un aigle, saint Matthieu, surmonté d’une tête d’ange, un apôtre ou évangéliste non identifié, saint Barthélémy, saint Jean-Baptiste, sainte Catherine d’Alexandrie portant sa roue et soumettant d’une épée son persécuteur, un évêque (saint Nicolas ?), saint Georges, surmonté d’un dragon, et un autre ange thuriféraire. Du côté de Cunégonde de Linange, on reconnaît saint Michel terrassant le démon et portant l’âme d’un défunt, quatre apôtres non identifiés, saint Pierre, reconnaissable à sa tonsure et la clé du Royaume des cieux, saint Paul tenant l’épée de son martyre, saint Jacques le Majeur en habit de pèlerin, un apôtre non identifié ainsi qu’un dernier ange portant un encensoir.

Pierre-Hippolyte Pénet

Historique :

Abbaye de Saint-Sauveur (Meurthe-et-Moselle). Donné au Musée lorrain en 1854 par Messieurs Thirion. Installé dans le vestibule du palais ducal, puis dans la salle des Tombeaux à la fin du XIXe siècle et enfin au centre de la nef de l’église des Cordeliers vers 1936.

Bibliographie :

DIGOT (Auguste), « Note sur le tombeau d’un comte de Salm, donné au Musée lorrain », Journal de la Société d’archéologie et du comité du Musée lorrain, Nancy, Lepage, 1854, p. 108-114.

MARTIMPREY (Edmond de),« Le tombeau d’Henry Ier, sire de Blâmont, et de Cunégonde de Linange, sa femme, au Musée lorrain », Journal de la Société d’archéologie lorraine et du Musée historique lorrain, janvier 1889, p. 20-22.

MARTIMPREY (Edmond de), « Les sires et comtes de Blâmont, étude historique », Mémoires de la Société d’archéologie lorraine, Nancy, Wiener, 1890, p. 76-192.

WIENER (Lucien), Musée historique lorrain au palais ducal de Nancy, Catalogue des objets d’arts et d’antiquité, Nancy, Wiener, 1895, cat. 118, p. 79.

CHATTON (Edmond), Histoire de l’abbaye de Saint-Sauveur et de Domêvre, 1010-1789, Nancy, Sidot frères, 1897, p. 65.

SCHMOLL GEN. EISENWERTH (Joseph Adolf), Die Lothringische skulptur des 14. Jahrhunderts. Ihre Voraussetzungen in der Südchampagne und ihre außerlothringischen Beziehungen, Petersberg, 2005, cat. 211, p. 320-322.

GUYON (Catherine), « Le tombeau provenant de Saint-Sauveur à la chapelle des Cordeliers », dans GUYON (Catherine) et ANDRIOT (Cédric) (dir.), L’abbaye de Saint-Sauveur-en-Vosges, mille ans d’histoire, Annales de l’Est, n° spécial, Nancy, 2010, p. 221-230.

BLANCHARD (Jean-Christophe), D’Alérions en alérions. Dix siècles d’images héraldiques lorraines, Haroué, Gérard Louis, 2012, p. 42-43.