Retable de la Sainte Trinité
Lorraine
Cat. 13
Lorraine
Retable de la Sainte Trinité
1522
Calcaire polychromé
H. 185 ; L. 222 ; Pr. 29 cm
Inv. 61.9.3
Don d’André Vuillemin, 1961
Depuis 1238, les frères du Saint-Esprit, ordre créé à Montpellier en 1198 et suivant la règle de saint Augustin, dirigeaient à Toul un hôpital fondé par Néméric Barrat, maître échevin de la cité. À partir de 1520, Jean Gerrier, gouverneur de la maison du Saint-Esprit de 1516 à 1550, acquit progressivement l’ensemble de la vallée de Quatre-Vaux, dans le Toulois, et y fit construire une ferme, une grande maison dotée d’un vaste enclos et une chapelle dédiée à saint Fiacre afin qu’elle puisse être utilisée comme lieu de prière par les religieux de l’ordre. En 1522, il dota la chapelle d’un retable polychromé placé au dessus de l’autel. Consacré à la Trinité, le retable se compose de deux parties. Le panneau supérieur est une représentation du Trône de grâce, thème iconographique connu depuis le XIIe siècle. Assis sur son trône, Dieu le Père soutient de ses mains la croix du Christ fichée sur un globe entouré de deux anges musiciens. Le Saint-Esprit, qui était peut-être représenté sous la forme d’une colombe posée au sommet de la croix, est également évoqué par ses sept dons mentionnés par les anges porteurs de phylactères : « S. SAPIENTIAE » (esprit de sagesse), « S. INTELLECTUS » (esprit d’intelligence), « S. CONSILII » (esprit de conseil), « S. FORTITUDINIS » (esprit de force), « S. SCIRE » (esprit de science), « S. PIETATIS » (esprit de piété), et « S.TIMORIS DEI » (esprit de crainte de Dieu). À la base du panneau vertical, les armes de Jean Gerrier, qui comportent notamment, à dextre, la double croix pattée d’argent de l’ordre, sont entourées de l’inscription « GLORIA TIBI TRINITAS. 1522 » (Gloire à toi Trinité. 1522).
Deux autres inscriptions apparaissent : la première, « VENI SANCTE SPIRITUS » (Viens, Esprit Saint), placée sous une coquille au sommet du trône, est le début de la séquence chantée lors de la Pentecôte. La seconde, un verset du psaume 103 également chanté lors de cette solennité, « EMITTE SPIRITUM TUUM ET CREABUNT[UR, ET RENOVABIS] FACIEM [TERRAE] » (Envoie ton Esprit, et ils seront créés, et tu renouvelleras la face de la terre), apparaît sur le galon du manteau du Père. Cette sculpture est très proche dans sa composition de celle conservée au musée d’Art et d’Histoire de Toul où des angelots portent de la même manière sur des phylactères les sept dons de l’Esprit (inv. D.944.1.1). Celle-ci a pu également être commandée pour les frères du Saint-Esprit de Toul. L’arrière du relief nancéien fut peint a posteriori de l’œil de Dieu et du Sacré Cœur de Jésus. Sur la prédelle du retable sont représentés plusieurs saints placés dans des niches ornées de coquilles. De gauche à droite, on distingue un saint évêque (sans doute Nicolas portant une des boules d’or offertes comme dot à trois jeunes filles pauvres), sainte Catherine tenant l’épée de son supplice et écrasant du pied l’empereur Maximin, saint Jean ayant à la main le calice empoisonné, saint Pierre portant les clés du Ciel, l’archange Gabriel et la Vierge de l’Annonciation, saint Paul avec l’épée de son exécution, saint Jean-Baptiste montrant l’Agneau de Dieu, sainte Barbe portant une tour et la palme du martyre et un saint évêque tenant une croix patriarcale.
Objet d’un pèlerinage local jusqu’en 1914, la chapelle fut progressivement délaissée et dégradée. En 1961, avant de vendre les bâtiments, son propriétaire André Vuillemin offrit une grande partie du mobilier au Musée lorrain. L’autel fut placé un an plus tard dans l’église des Cordeliers où il vint remplacer celui qui y avait été installé en 1938. Afin de reconsacrer ce nouveau maître-autel, des reliques de la Bienheureuse Marguerite de Lorraine envoyées par le monastère de l’Ave Maria d’Alençon ainsi que de la Bienheureuse Alix Leclerc y furent installées.
Pierre-Hippolyte Pénet
Historique :
Chapelle Saint-Fiacre de Rigny-Saint-Martin (Meurthe-et-Moselle). Offert en 1961 au musée par André Vuillemin avec une grande partie du mobilier de la chapelle : statues de la Vierge (61.9.4), de saint Fiacre (61.9.5 et 6), de sainte Barbe (61.9.7), deux bancs (61.9.8 et 9) et clôture du chœur (61.9.10). Installé en 1962 dans l’église des Cordeliers comme nouveau maître-autel.
Bibliographie :
VUILLEMIN (André), « La chapelle de Saint-Fiacre (Rigny-Saint-Martin) », Le Pays lorrain, 1962, p. 33-44.
SIMONIN (Pierre), « Retables sculptés gothiques et de la première Renaissance en Lorraine », Lotharingia, Archives lorrains d’archéologie, d’art et d’histoire, Nancy, Thierry Alix, t. II, p. 242.