Pierre tombale d’Otto, Rhingrave de Kyrbourg

Lorraine

Cat. 30
Lorraine
Pierre tombale d’Otto, Rhingrave de Kyrbourg
Vers 1607
Grès
H. 232 ;  L. 112 ; Pr. 23 cm
Inv. 95.115
Don de la Ville de Fénétrange, 1860

Les Wildgraves (en français : comtes sauvages) et les Rhingraves (comtes du Rhin) sont deux familles aristocratiques germaniques résidant respectivement à Kyrn et Rheingraffenstein (actuelle Rhénanie-Palatinat). Au XVe siècle, les deux familles, unies par un mariage, s’implantèrent grâce à d’autres alliances matrimoniales au sein de l’espace lorrain, acquérant de nombreuses possessions. Cette pierre tombale représente Otto, Rhingrave de Kyrbourg (1538-1607), fils unique de Jean VIII et d’Anne de Hohenlohe. Il fut le cousin issu de germain de Frédéric, Rhingrave de Dauhn, nommé à la charge prestigieuse de grand écuyer du duc Charles III de Lorraine. La position éminente de la famille au sein de la noblesse ducale apparaissait clairement lors de la réunion à Nancy des États de Lorraine de 1594 où Frédéric et Otto étaient respectivement cités en cinquième et sixième position. À la mort de son père, Otto hérita des terres et seigneuries de Kyrbourg, Wildenbourg, Troneck, Morhange, Puttelange, Diemering, Amance ainsi que de la baronnie de Fénétrange. Celle-ci était en indivision entre les différents Rhingraves qui, en 1565, y introduisirent avec violence la Réforme en expulsant les chanoines de la collégiale Saint-Pierre.

C’est au sein de cette église, transformée en temple, que fut inhumé Otto après son décès, survenu le 7 juin 1607. Sa pierre tombale y était sans doute installée debout, soit dans le chœur, soit dans la chapelle de Landsberg selon Louis Benoit. Elle fut probablement extraite de la collégiale en 1682 lorsque les armées de Louis XIV occupèrent Fénétrange et rendirent l’église à sa vocation première. Sur la pierre tombale, le Rhingrave est représenté debout, armé de toutes ses pièces, à l’exception du heaume, placé au sol et remplacé par une petite toque qui apparaît déjà démodée. Une chaîne à anneaux carrés, d’où pendait un médaillon aujourd’hui effacé, est accrochée autour de son cou. Un nœud sert le ceinturon auquel sont accrochées une petite dague, dont on ne distingue que la poignée ciselée, et une épée que le Rhingrave tient par le pommeau de la main gauche. Debout sur un lion, le défunt se détache sur un fond architecturé auquel est accrochée une tapisserie réticulaire ornée de fleurons et de rosaces.

Otto est encadré par des blasons bûchés qui représentaient les quatre quartiers héraldiques de ses lignes paternelles et maternelles. En haut à gauche, on peut restituer l’écu des Wild et Rhingraves : « écartelé au 1 et 4 de sable à un léopard d’argent à queue fourchue armé et lampassé de gueules (Rhingraves), au 2 et 3 d’or à un lion rampant de gueules armé, couronné et lampassé d’azur (Wildgraves) et, sur le tout, parti au 1 de gueules à trois lions rampants d’or placés 2 et 1 (Kyrbourg), au 2 coupé de gueules semé de croisettes d’or recroisetées de même à deux saumons adossés d’argent (comté de Salm) et d’azur à la fasce d’argent (Fénétrange) ». En bas à droite apparaissaient les armes de la famille de la grand-mère paternelle d’Otto, Anne d’Isenbourg : « d’argent à la face de sable de deux pièces ». Au côté droit figuraient les quartiers correspondants aux grands-parents maternels d’Otto : en haut étaient représentées les armes de Georges de Hohenlohe : « d’argent à deux léopards rampants de sable armés, membrés et lampassés de gueule » et, en bas, celles de son épouse Praxède de Sulz : « d’argent à l’emmanchure de gueules de trois pièces ».

Pierre-Hippolyte Pénet

Historique :

Collégiale de Fénétrange (Moselle). Probablement descellée et transférée dans l’ancien cimetière de la ville en 1682. Donnée au musée en 1860, présentée dans le vestibule du palais ducal puis dans la partie haute de la galerie basse, puis dans la salle de la sculpture lorraine dans les années 1930. Déplacée vers 1936 dans l’église des Cordeliers.

Bibliographie :

BENOIT (Louis), « Notes sur la Lorraine allemande – Les rhingraves et les reîtres pendant les guerres de religion du XVIe siècle. I. », Journal de la Société d’archéologie lorraine et du comité du Musée lorrain, mai 1860, p. 75-85.

BENOIT (Louis), « Notes sur la Lorraine allemande – Les rhingraves et les reîtres pendant les guerres de religion du XVIe siècle. II », Journal de la Société d’archéologie lorraine et du comité du Musée lorrain, juin 1860, p. 91-119.

BENOIT (Louis), « Notes sur la Lorraine allemande – Les rhingraves et les reîtres pendant les guerres de religion du XVIe siècle. III », Journal de la Société d’archéologie lorraine et du comité du Musée lorrain, juillet 1860, p. 122-136.