Œuvre majeure

Les Aciéries de Pompey

Michel Colle (1872, Baccarat -1949, Batz-sur-Mer)
1909
Huile sur bois
H. 58 ; l. 82,1 ; P. 2,2
Inv. 99.2.2
Achat en vente publique, 1999

Au début du XXe siècle, en pleine expansion de la sidérurgie lorraine, Michel Colle réalise une représentation estompée voire bucolique de l’usine Dupont et Fould de Pompey (Meurthe-et-Moselle), spécialisée dans la production d’acier.

Michel Colle travaille dès l’âge de 15 ans aux Cristalleries de Baccarat, sa ville natale. Il se révèle rapidement habile et précis et occupe différents postes de dessinateur, tailleur et graveur. Très tôt au contact de l’impressionnisme et du néo-impressionnisme, il s’adonne au dessin et à la peinture pendant son temps libre. Encouragé et soutenu par les artistes Peccatte, Meixmoron, Friant et Prouvé, Colle quitte définitivement les Cristalleries en 1904. Il est alors embauché par Eugène Corbin, mécène et commanditaire, pour qui il réalisera jusqu’en 1911 près de 500 huiles ou aquarelles des paysages lorrains. Il devient ensuite peintre à part entière et fera de la Bretagne sa seconde patrie.

Attaché à sa terre natale, Michel Colle peint la Lorraine avec passion et persévérance. Une inscription au dos du tableau a d’abord conduit à interpréter ce paysage comme celui des Cristalleries de Baccarat. Mais la masse imposante de l’usine, la voie ferrée avec la gare en contrebas, les silhouettes des hautes cheminées fumantes et surtout la représentation de hauts-fourneaux confirment qu’il s’agit des aciéries Dupont et Fould de Pompey. Des photographies du début du siècle ou une estampe de René Wiener en témoignent, ainsi qu’un dessin publicitaire. Sur ce dernier est mise en avant la participation de l’usine à l’Exposition universelle de 1889 : en tant que fournisseur du fer nécessaire à la construction de la Tour Eiffel et comme exposant au Palais des Industries diverses.

Cette œuvre témoigne de l’importance de la sidérurgie lorraine et de l’usine de Pompey au XXe siècle. Et contrairement à la vision habituelle de l’industrie, intense, bruyante voire étouffante, Michel Colle nous en offre une vision apaisée et tranquille, en jouant des codes impressionnistes. Cette usine, qui a littéralement bouleversé le paysage rural est ici paisiblement intégrée dans le panorama. Ce point de vue harmonieux presque idyllique ne laisse en rien présager la désindustrialisation de la fin du siècle. Critique d’art visionnaire, Émile Nicolas avait pourtant décrit en 1910 le travail de Colle comme autant d’ « œuvres fortes qui constitueront de précieux documents pour l’avenir, alors que la métallurgie aura disparu de notre région ».

Michel Colle, Les aciéries de Pompey, huile sur bois, 1909

Michel Colle, Les aciéries de Pompey, huile sur bois, 1909