La Jardinière au pot cassé

Manufacture de Niderviller

Manufacture de Niderviller
Paul-Louis Cyfflé (auteur du modèle)
Fin du XIXe siècle
Biscuit de porcelaine
H. 21,5 ; L. 9,5 ; P. 9 cm
Inv. 39.3.6
Legs de René Wiener, 1939
Marque N° F 26 à la pointe

Cette statuette, dont le modèle est attribué à Paul-Louis Cyfflé (1724-1806), est le pendant du Jardinier appuyé sur sa bêche. Sur un socle rond, une jardinière regarde d’un air attristé son pot de fleurs cassé gisant au sol. La jeune fille porte un bonnet à barbes relevées, un corsage lacé sur le devant auquel est accrochée une rose, une chemise aux manches retroussées et une jupe bordée d’un liseré. Ses pieds nus donnent une signification galante à la scène. Les yeux baissés, la bouche ouverte et les mains jointes, la jeune fille prend un air résigné. Du pot cassé s’échappe sur le sol une motte de terre et un pied de rosier tandis qu’un arrosoir complète la composition.

Le sujet rappelle la toile de Jean-Baptiste Greuze, La Cruche cassée, peinte en 1771. Recensée dans les collections de la comtesse du Barry à Louveciennes, elle est aujourd’hui conservée au musée du Louvre. Cette allégorie de l’innocence évanouie a été très largement diffusée par la gravure. Si le thème est à rapprocher du dicton populaire « Tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se casse », ou bien encore de la mésaventure de Perrette dans la Fable de Jean de La Fontaine, la représentation de la virginité perdue ne fait aucun doute. Le thème fait ainsi écho au groupe de L’Oiseau mort. La jeune jardinière serait-elle alors l’objet des pensées du jardinier qui rêve appuyé sur sa bêche ? Ce modèle, produit à la manufacture de Lunéville, a été de nombreuses fois imité à Saint-Clément, à Toul-Bellevue et à Niderviller, démontrant ainsi le goût pour les sujets galants et champêtres de la clientèle au XVIIIe siècle. Cette œuvre se démarque de celles de la manufacture de Vincennes-Sèvres qui produit alors des figures de jardiniers, de jardinières et d’enfants jardiniers d’après des dessins de François Boucher.

Marie Pintre

Bibliographie :

NOËL (Maurice), « Les biscuits de Cyfflé, étude de thèmes », La Lorraine dans l’Europe des Lumières, Actes du colloque de la Faculté des lettres et des sciences humaines de l’Université de Nancy, 1968, p. 246.

HORIOT (Maïté), Paul-Louis Cyfflé et les terres de Lorraine aux XVIIIe-XIXe siècles dans les collections du Musée Historique Lorrain, mémoire de maîtrise d’histoire de l’art sous la direction de François PUPIL et Francine ROZE, Université de Nancy 2, 2002-2003, pp. 43-46, n°16.

CALAME (Catherine), Cyfflé, orfèvre de l’argile. Ses statuettes en terre de Lorraine et les reprises par les manufactures régionales [cat. exp., « Cyfflé, orfèvre de l’argile », Saint-Clément, 1er août-17 août 2009], Lunéville, Association des Amis de la Faïence ancienne de Lunéville Saint-Clément, Office de Tourisme et château des Lumières, 2009, pp. 81, 87, 94, 98, 146-147.