La Ravaudeuse

Manufacture de Niderviller

Manufacture de Niderviller (direction de François-Henri Lanfrey)
Paul-Louis Cyfflé (auteur du modèle)
Fin du XVIIIe – début du XIXe siècle
Biscuit de porcelaine
H. 24,5 ; L. 15,5 ; P. 14,5 cm
Inv. 95.863.1
Achat, entre 1884 et 1887
Marque NIDERVILLER estampée en creux

Selon la définition de l’Encyclopédie, le terme « ravaudeuse » désigne l’un des nombreux petits métiers du XVIIIe siècle : « on nomme ainsi toute femme qui a d’ordinaire une espèce de petite boutique portative, et qui dans quelque endroit d’une rue raccommode des hardes, et plus ordinairement toutes sortes de bas de fil, de laine, de coton, de soie, etc. ». La Ravaudeuse et son pendant Le Savetier furent deux des modèles les plus célèbres de Paul-Louis Cyfflé. Probablement créés dans les années 1760-1770, ils apparaissent en tant que pendants distincts ou bien rassemblés sur une même terrasse comme dans les tarifs de la manufacture de Toul-Bellevue à l’époque de Bayard Père et Fils autour de 1778.

Le motif de la ravaudeuse se rattache au thème plus général des Cris de Paris et se trouve notamment dessiné dès 1737 par Charles-Nicolas Cochin fils puis gravé par Simon-François Ravenet. Il fait également écho à un célèbre ouvrage libertin du XVIIIe siècle écrit par Louis-Charles Fougeret de Monbron et publié en 1753. Intitulé Margot la Ravaudeuse, il narre les aventures licencieuses d’une jeune femme abandonnant le domaine de la couture pour se lancer dans le monde de la galanterie. Le livre fut publié à Hambourg illustré d’un frontispice de Christian-Friedrich Fritzsch représentant l’héroïne en train de repriser un bas, assise dans le baquet qui constitue son échoppe.

Représentée sous les traits d’une vieille femme,la ravaudeuse de Cyfflé fut déclinée sous différentes formes selon les manufactures. À Toul-Bellevue et Niderviller, elle est assise dans un baquet ouvert sur sa partie antérieure et surmonté de deux arcatures soutenant une bâche qui l’abrite. Vêtue d’un bonnet de dentelle, d’un habit et d’un tablier, elle est en train de repriser un bas mais tourne son regard en souriant vers le jeune savetier qui siffle des mélodies à son petit sansonnet en cage. À ses pieds, on remarque une corbeille contenant des bobines de fils, une pelote de laine et un linge. Dans le catalogue de 1874 de la manufacture de Saint-Clément, le personnage, légèrement différent, est placé dans une échoppe comprenant du mobilier et se trouve accompagné d’un enfant. Enfin, dans le catalogue de Lunéville de 1892, la ravaudeuse est représentée dans un demi-tonneau et regarde avec amusement un chat placé en équilibre juste au dessus d’elle.

Pierre-Hippolyte Pénet

Bibliographie :

MILLIOT (Vincent), Les Cris de Paris ou le peuple travesti. Les représentations des petits métiers parisiens (XVIe-XVIIIe siècles), Paris, Publications de la Sorbonne, 1995, pp. 406-407.

NOËL (Maurice) in BASTIAN (Jacques) (dir.), Notice dans Faïences de Lorraine, 1720-1840, [cat. exp., Nancy, Musée lorrain, 14 mai-29 septembre 1997], Nancy, éditions du Pays Lorrain, 1997, p. 70.

HORIOT (Maïté), Paul-Louis Cyfflé et les terres de Lorraine aux XVIIIe-XIXe siècles dans les collections du Musée Historique Lorrain, mémoire de maîtrise d’histoire de l’art sous la direction de François PUPIL et Francine ROZE, Université de Nancy 2, 2002-2003, pp. 24-27, n°1.

CALAME (Catherine), Cyfflé, orfèvre de l’argile. Ses statuettes en terre de Lorraine et les reprises par les manufactures régionales [cat. exp., « Cyfflé, orfèvre de l’argile », Saint-Clément, 1er août-17 août 2009], Lunéville, Association des Amis de la Faïence ancienne de Lunéville Saint-Clément, Office de Tourisme et château des Lumières, 2009, pp. 66, 80, 93, 94.