Le Vieux chasseur

La figure du « vieil homme tranquille sur sa chaise » apparaît dans le catalogue des tarifs des pièces et marchandises édité à la manufacture de faïence de Toul-Bellevue entre 1773 et 1789. Dirigée par Charles Bayard jusqu’à la Révolution, la faïencerie de Toul-Bellevue obtient le titre de Manufacture Royale en 1773 et rivalise avec les productions de Lunéville. Deux modeleurs de Paul-Louis Cyfflé, Jean-Bernard Würtzbacher et Nicolas Rémy, sont embauchés comme repareurs en 1778 et 1779, tandis que les moules du premier sont acquis pour la manufacture. Les modeleurs sont en charge de la réalisation des moules permettant la reproduction des figures tandis que les repareurs assemblent les différentes parties estampées, les cisèlent et affinent les détails. De nombreux modèles vendus à Toul-Bellevue sont des créations de Cyfflé, même si le nom de ce dernier n’est pas indiqué. Le vieux chasseur apparaît à nouveau dans le catalogue des tarifs de Toul-Bellevue de 1875 et de 1898.

Le vieil homme barbu est assis sur une chaise en bois à haut dossier, une canne entre les genoux. Fermée par trois boutons, sa redingote, dont les pans retombent de chaque côté du siège, laisse apparaître un gilet tandis qu’une chemise dépasse de ses manches amples. Des chausses et des chaussures en cuir complètent la tenue. Le vieillard a retiré son chapeau aux bords retournés qu’il tient posé sur ses genoux. De sa main gauche, il caresse un chien assis à ses pieds, la tête penchée vers l’animal. Une cruche est posée sur le sol dallé. Le socle rectangulaire aux bords concaves tronqués, caractéristique de la production de Cyfflé à Lunéville, porte au revers l’écusson de Toul avec les initiales AB, pour Aubry Bellevue, ainsi que la lettre P. On peut supposer que ces initiales renvoient plutôt à la direction de Georges Aubry (1898 – 1925) car les pièces réalisées sous la direction de son prédécesseur Jules (1860 – 1898) portaient plutôt ses initiales JA. Le modèle du catalogue de Lunéville de 1892, mentionné comme une création de Cyfflé, diffère légèrement de la figure de Toul-Bellevue, le personnage portant notamment son chapeau sur la tête. Le Vieil homme et son chien, similaire à la figure de Lunéville, apparaît au n°33 du Livre des formes de la manufacture de Niderviller. Le Vieux chasseur s’inscrit dans les représentations de la vie domestique auxquelles Cyfflé a donné une attitude réaliste. Avec son pendant, La Vieille fileuse, il symbolise la sérénité de l’âge mûr.

Marie Pintre

Bibliographie :

HORIOT (Maïté), Paul-Louis Cyfflé et les terres de Lorraine aux XVIIIe-XIXe siècles dans les collections du Musée Historique Lorrain, mémoire de maîtrise d’histoire de l’art sous la direction de François PUPIL et Francine ROZE, Université de Nancy 2, 2002-2003, pp. 48-49, n°18.

CALAME (Catherine), Cyfflé, orfèvre de l’argile. Ses statuettes en terre de Lorraine et les reprises par les manufactures régionales [cat. exp., « Cyfflé, orfèvre de l’argile », Saint-Clément, 1er août-17 août 2009], Lunéville, Association des Amis de la Faïence ancienne de Lunéville Saint-Clément, Office de Tourisme et château des Lumières, 2009, pp. 65, 70, 94, 98, 139.