Portrait de Léopold, duc de Lorraine et de Bar

Nicolas Dupuy

Nicolas Dupuy (1650, Pont-à-Mousson – 1711, Lunéville ?)
1703
Huile sur toile
H. 195 ; l. 146 cm
Signé et daté « Du Puy fecit 1703 »
Nancy, Palais des ducs de Lorraine - Musée lorrain,
inv. D. 95.361
Dépôt du musée des Beaux-Arts de Nancy, 1881

Nicolas Dupuy a été actif à Metz avant de rejoindre le jeune duc Léopold à Nancy puis à Lunéville, où il réalise de nombreux portraits de la famille ducale. D’abord « peintre de Son Altesse Royale » puis « premier peintre », il est finalement anobli en 1706. Dupuy appartient à la première génération d’artistes locaux qui vont participer à la construction de l’image officielle du duc, avant l’arrivée des Français Jacques Van Schuppen ou Pierre Gobert. C’est un modèle du portrait d’apparat qu’il offre ici, inscrit dans une tradition iconographique remontant au XVIe siècle, par-delà l’exemple de Hyacinthe Rigaud. L’œuvre a quelque chose de figé et presque hiératique. Dupuy a su parfois insuffler plus de vie, comme dans un autre portrait conservé au musée du château de Lunéville où Léopold abandonne la longue perruque pour laisser apparaître sa chevelure naturelle. Cette dernière œuvre appartient à un autre type fréquent dans l’iconographie ducale : celui du portrait en cuirasse, rappel des faits d’armes du jeune Léopold contre les Turcs sur les traces de son père Charles V.

Véritable manifeste, le portrait du Musée lorrain réunit tous les symboles de la souveraineté, dans un raccourci visuel d’une efficacité redoutable, au détriment sans doute de la finesse de la composition. De lourdes draperies faites de l’incontournable velours cramoisi, couleur traditionnelle du pouvoir, se relèvent en forme de dais au-dessus du trône de convention sur lequel le duc est assis. Il est revêtu d’un long manteau de drap d’or à collet et doublure d’hermine ; alérions et croix de Lorraine s’y détachent grâce à leur broderie de fil d’argent. Léopold porte le collier de la Toison d’or reçu en 1690 et tient de la main droite un sceptre terminé d’un alérion. Mais le signe le plus marquant de son autorité est la couronne, bien visible au second plan. C’est un symbole auquel Léopold tient particulièrement, en lien avec son titre de roi de Jérusalem. Dès 1698, lors des préparatifs de son mariage, il a fait apposer sur ses carrosses et sa vaisselle d’argent commandés à Paris cette couronne fermée, une nouveauté dans l’emblématique ducale que Saint-Simon, toujours mauvaise langue, devait tourner en ridicule. Son usage se double de la reconnaissance du titre d’Altesse Royale, déjà obtenu de l’empereur, mais que Louis XIV lui refusera toujours. C’est seulement pendant la régence de son beau-frère Philippe d’Orléans que le duc de Lorraine reçut enfin cette faveur de la France.

Thierry Franz

Audioguide station 9 : Dupuy, Portrait de Léopold

Historique :

Déposé par le musée des Beaux-Arts de Nancy au Musée lorrain en octobre 1881.

Expositions :

Les châteaux de la Malgrange, Jarville-La Malgrange, 9 au 24 mai 1995.

La Toison d'or, un mythe européen, Manderen, Château de Malbrouck, 5 septembre - 13 décembre 1998.

Lothringens Erbe. Franz Stephan von Lothringen (1708-1765) und sein Wirken in Wirtschaft, Wissenschaft und Kunst der Habsburgermonarchie, Innsbruck, schloss Schallaburg, 2000

Bibliographie :

SOUCHAL François, « Recherches sur un peintre lorrain oublié : Nicolas Dupuy », Gazette des Beaux-Arts, novembre 1962, p. 487-496.

VOREAUX Gérard, Les Peintres lorrains du dix-huitième siècle, Paris, éditions Messene, 1998.

VOREAUX Gérard, « La peinture dans le décor de la Cour pendant le règne du duc Léopold », dans CHARLES-GAFFIOT Jacques (sous la dir. de), Lunéville. Fastes du Versailles lorrain, Paris, éditions Didier Carpentier, 2003, p. 89-97.