Couleuvrine à l’emblématique de Charles Quint
Anonyme
Vers 1530
Bronze
H. 31 ; L : 2,80 m ; l. 40 ; calibre : 93 mm ; poids : 507 kg ; projectile (boulet en fer) : environ 3 livres
Paris, Musée de l’Armée, inv. 2012.0.446
En Europe occidentale à partir des années 1470, l’emploi généralisé du bronze pour la fabrication des bouches à feu et l’utilisation croissante des boulets métalliques en fonte de fer entraînent une relative uniformisation des matériels. Par ailleurs, l’adjonction d’un cul-de-lampe à l’arrière des pièces les rend plus résistantes et permet l’utilisation d’une charge de poudre plus importante. Cette artillerie nouvelle est utilisée pour le siège ou la bataille rangée. Le calibre des pièces, qui n’était pas discriminant jusqu’alors, devient désormais la variable de différenciation entre elles et la base d’une nouvelle nomenclature. Les bouches à feu sont alors désignées par des noms issus de la famille des reptiles pour les gros calibres - basilic, canon serpentin, couleuvrine – de celle des oiseaux pour les pièces plus légères - faucon, fauconneau, sacre, émerillon.
Cette couleuvrine se distingue par une ornementation très soignée ; sa morphologie à pans coupés est rythmée de motifs héraldiques qui ont permis l’attribution à Charles Quint. À l’arrière de la pièce, le bouton de culasse en forme de tête de chien est caractéristique de la mode des culs-de-lampe ornés d’évocations animalières (ours, lion, canidés) très en vogue au début du XVIe siècle.
Après une longue et féconde période de recherches et malgré certaines réticences initiales, l’artillerie s’est imposée sur les champs de bataille. Ses spectaculaires effets de bruit, de flammes et de fumées, alimentés par des mystères persistants comme le mode d’action de la poudre à canon, lui ont conféré l’aura mythique et le prestige d’un attribut régalien. Ainsi cette couleuvrine, nous livre-t-elle un témoignage précieux sur les redoutables bouches à feu qui n’ont cessé d’embraser l’espace lorrain de la bataille de Nancy en 1477 à la « chevauchée d’Austrasie » en 1552.
Sylvie Leluc
Historique :
1830, musée d’artillerie ; 1905, musée de l’Armée.
Bibliographie :
CONTAMINE Philippe, « Les industries de guerre dans la France de la Renaissance : l'exemple de l'artillerie », Revue Historique, t. 271, fasc. 2, Paris, avril-juin 1984, p. 249-280.
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DECKER Michel, « Histoire de l’artillerie de terre française », Cahiers d'études et de recherches du Musée de l'Armée. Hors-série n°1, Paris, CERMA, 2003, p. 22. Cahiers d'études et de recherches du Musée de l'Armée. Hors-série n°4 : Nouveaux regards sur l’artillerie primitive, XIVe siècle - XVIe siècle, Paris, CERMA, 2008.
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CROUY-CHANEL Emmanuel de, Le canon jusqu’au milieu du XVIe siècle. France, Bretagne, Pays-Bas bourguignons, 3 vols., thèse inédite, Université de Paris I, 2014.
LEDUC Antoine, « L’artillerie : une arme nouvelle à la fin du Moyen-Age » dans LEDUC Antoine, LELUC Sylvie et RENAUDEAU Olivier (sous la dir. de), Chevaliers et Bombardes, d’Azincourt à Marignan, 1415-1515 [cat. exp, Paris, Musée de l’Armée, 7 octobre 2015-24 janvier 2016], Paris,Gallimard,p 48-57.