Jean-Joseph Weerts (1847, Roubaix – 1927, Paris)
1906
Huile sur toile
H. 170 ; l. 230 cm
Inv. 96.2.1
Achat à la Galerie de la Gare, Nice, 1996
Cette œuvre met en scène deux femmes représentant les deux provinces perdues après la guerre de 1870, l’Alsace et la Lorraine. Rien ne permet de les identifier car elles sont vêtues à la manière antique et non des costumes traditionnels dont ces allégories sont habituellement affublées dans les peintures patriotiques.
Au sol est posé un drapeau tricolore, les mains des deux allégories s’entrelaçant et se serrant sur sa hampe. Au deuxième plan sur la droite du tableau, on distingue un panneau-frontière qui matérialise l’annexion des deux régions au nouveau Reich allemand. À l’arrière-plan, on aperçoit, derrière un paysage de désolation, une ville et la flèche d’une cathédrale : celle de Strasbourg, alors sous domination allemande.
La composition de l’œuvre est très étudiée : la disposition générale se fait sous la forme d’une frise dont le triangle central est constitué par les deux jeunes femmes désespérées. L’élévation du bras de la jeune femme blonde dans le paysage désertique, ravagé par la guerre, et dans ces teintes obscures, accentue une douleur assumée pour mieux susciter l’effet de saisissement chez le spectateur.
D’origine belge, Jean-Joseph Weerts est très attaché à sa patrie de cœur, la France, et il témoigne de cette affection par la réalisation de quelques tableaux patriotiques dont celui-ci, exécuté en 1906 et présenté la même année au salon de la Société Nationale des beaux-arts.
La défaite subie après la guerre de 1870 et surtout la perte de l’Alsace et de la Lorraine sont vécues par les Français comme une humiliation, et ce sentiment alimente jusqu’à la fin du XIXe siècle un fort esprit de revanche. Mais au début du XXe siècle, cette annexion n’est plus au premier rang des préoccupations de l’opinion et de nombreux Français vivent sur des stéréotypes et des représentations souvent éloignés de la réalité.
Le patriotisme français connaît un nouvel essor après la crise marocaine de 1905 et l’idée du relèvement national ainsi que d’une revanche reviennent avec force dans l’imagination des Français. C’est dans cet état d’esprit que Weerts exécute son tableau.
Oeuvre restaurée en 2014